vendredi 28 mars 2008

Que s'est-il passé aux Comores?

Le colonel Mohamed Bacar, rêvait que son île d'Anjouan se sépare de l'Union des Comores, mais il vient d'être détrôné par l'Union africaine. En seulement deux jours, l'opération «Démocratie aux Comores» soutenue par la France a donné raison à l'autorité centrale. Quelques reperds pour mieux comprendre cette opération express.

Des soldats comoriens devant le palais présidentiel d'Anjouan dont ils ont pris le contrôle le 26 mars 2008 Jose Cendon / AFP -

Comment s'est déroulée l' opération «Démocratie aux Comores»?


Mardi 25 à l'aube, les troupes de l'Union africaine (UA) débarquent sur les plages d'Anjouan avec l'aide des autorités fédérales de la Grande Comore et le soutien de la France. Ils prennent possession de la capitale Mutsamudu et trouvent la présidence vide. Les soldats se lancent à la recherche de l'ancien président.

Le colonel Mohamed Bacar a fuit la capitale en secret pour la résidence de son frère à Mayotte avec vingt-trois de ses proches. Ils sont appréhendés et dé
sarmés par les autorités françaises pour «non respect de la législation française, dont l’entrée clandestine à Mayotte et détention d’armes».

Bacar est transféré en zone de rétention sur une petite île adjacente où se trouve l’aéroport. Les autorités de Mayotte interrompent le trafic et des gendarmes français de la Réunion arrivent en pour éviter le lynchage de du président en fuite. Un a
vion de l'armée de l’air française emmène M. Bacar à la Réunion dans la nuit de jeudi à vendredi.

Qu'est ce que les Comores ?

Rattachés à Madagascar pendant la période coloniale française, les trois îles de l'archipel sont devenues indépendantes en 1975. Elles ont connu une vingtai
ne de coups d'Etat ou tentatives de coup d'Etat depuis.

L'Union des Comores a été créée en décembre 2001. Elle regroupe les îles de Grande Comore, de Mohéli et d’Anjouan, soit 632 000 habitants sur 2 200 km2.

Le chef d’Etat et du gouvernement Ahmed Abdallah Sambi dirige l’Union des Comores depuis la capitale Moroni, mais chaque île dispose d'une large autonomie.

Qui est Mohamed Bacar ?


Ce colonel de 46 ans est devenu président d'Anjouan en 2001 suite à un coup d'Etat. Il a été réélu en juin 2007 car il était le seul candidat à ne pas boycotter les urnes. Election qui n'a pas été reconnue par l'Union des Comores et l'Union Africaine.

Opposant au président Sambi, il se défendait d'être un dictateur et souhaitait l'indépendance de son île, comme il l'expliquait aux journalistes de France 24 depuis son grand bureau présidentiel.

En plus d'être détesté de Moroni, il était devenu très impopulaire à Anjouan où on le surnommait «le chien». Il s’appuyait sur un groupe restreints de militaires, de commerçants et hommes d’affaires. Les ministres de son gouvernement vidaient peu à peu les caisses de l'île et les fonctionnaires n'étaient plus payés. Des clandestins quittaient régulièrement Anjouan pour Mayotte, fuyant le régime ou les mauvaises conditions économiques, comme l'explique un reportage de Rue 89 de l'été dernier.

Peu de temps avant le débarquement des forces africaines, le colonel Bacar promettait de se battre de pour défendre l'île. Il a préféré de fuir vers Mayotte, où il a immédiatement demandé l'asile politique français.

Pourquoi Bacar s'attendait à cette attaque ?

Sa réélection en juin 2007 n'est reconnue ni par l'autorité centrale, ni par l'Union africaine.
L'UA impose alors des sanctions personnalisées contre les dignitaires ajouannais dans le but de contraindre M. Bacar à organiser de nouvelles élections: interdiction de sortie d’Anjouan et blocage des comptes bancaire à l’étranger...

Fin novembre, le président de l'Union des Comores, M. Sambi demande une intervention militaire de l’UA pour «libérer» Anjouan : l’UA refuse mais prolonge les sanctions contre les dirigeants anjouanais.

Fin mars, M. Bacar savait qu'il serait bientôt inquiété. Des journalistes de France 24 l'ont rencontré peu de temps avant l'opération militaire.

Que deviennent le colonel et l'île d'Anjouan ?

Le président déchu a demandé l'asile politique à la France. Yves Jégo, secrétaire d’Etat à l’outre-mer a annoncé jeudi 27 que la France « étudie la demande d’asile politique » de Mohamed Bacar. Mais cette procédure administrative est distincte de celle de la justice, comme l'a souligné le procureur de la Réunion.

Le procureur de la République à la Réunion François Muguet a annoncé que le Colonel Bacar et les 23 personnes qui l'ont accompagné dans sa fuite seront déférés devant la justice (française) samedi pour «non respect de la législation française, dont l’entrée clandestine à Mayotte et détention d’armes». Bacar risque cinq ans de détention maximum.

Dès jeudi, les Comores ont réclamé le retour de Bacar, pour qu'il soit traduit devant la justice de Moroni. Mais il n'existe pas d'accord d'extradition entre les deux pays. «Si la France ne peut pas les extrader vers un pays où la peine de mort est en vigueur, alors qu'elle les envoie dans un autre tribunal comme celui de La Haye» a réclame M. Sambi. Le ministre comorien de la Défense a indiqué mercredi que des mandats d'arrêts internationaux avaient été émis contre M. Bacar et ses collaborateurs pour «rébellion et tortures».

Dès mercredi, le palais présidentiel de Mutsamudu a trouvé un nouvel occupant. Iklililou Dhoinine, un des vice-présidents de l’Union des Comores dirige une administration provisoire désignée pour gérer l’île jusqu’aux prochaines élections.

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